- Des voix critiques vis-à-vis de l’Europe se font entendre à ses quatre coins. Ressentie comme cause de beaucoup, sinon de tous les maux, elle s’interroge sur sa propre existence. Réaction plutôt saine d’introspection pour l’individu, cette interrogation aujourd’hui frénétique ne peut que mettre en péril une institution collective de cette ampleur.
Construite sur des bases économiques, elle a peu à peu cédé aux tentations insidieuses d’un libéralisme extrême, pour ne pas dire sauvage, faisant de la libre (et trop souvent féroce) concurrence son credo. On en voit aujourd’hui les conséquences: le rejet d’un projet commun, qui impliquerait des avantages et des concessions de la part de chaque membre, le repli sur les égoïsmes nationaux, et à l’intérieur de ceux-ci sur les particularismes régionaux, jouent désormais la carte absurde de la concurrence entre États et entre régions, chacun s’accrochant désespérément à l’illusion de pouvoir s’enrichir sans les autres, sinon sur le dos des autres.
Quelques voix pourtant s’élèvent pour rappeler l’impérieuse nécessité d’une union (qui, comme on le dit en Belgique sans vraiment l’appliquer, fait la force), quitte à en redessiner les contours et le mode de fonctionnement. Mais ces voix ont plus de 60 ans, elles ont assisté à la naissance de l’Union, et peut-être ne peuvent-elles simplement pas accepter la fin du rêve d’une génération. Les Cohn-Bendit, Michel (Louis, pas Charles!), Davignon, Verhofstadt, Juncker réussiront-ils à donner l’impulsion qui éviterait une fin catastrophique, les citoyens européens (re)trouveront-ils – mais quelles voix tant soit peu passionnées les y entraîneront ? – le goût de l’aventure commune et de la collaboration ?
A lire les commentaires des lecteurs de quotidiens, dans Le Soir ou El País par exemple, ça n’a pas l’air d’être pour demain. A moins qu’une hypothétique « majorité silencieuse » …