École, que fais-tu de nos enfants ?
C’est malgré toi, et tes carcans, que je suis aujourd’hui capable, du fond de ma retraite, de t’écrire les mots qui fâchent.
C’est grâce à toi, à ton obsession du contrôle, que je suis devenu rebelle.
C’est avec toi, et ton immobilisme maladif, que j’ai vécu plus de trente de mes années d’adulte.
École, aujourd’hui, que fais-tu de nos enfants ?
As-tu enfin appris qu’on n’apprend rien sous la contrainte ?
Que ta mission est de donner à tous l’élan, la curiosité, l’envie et le bonheur d’apprendre ?
Que les enfants sont tous différents ?
Que les faire entrer de force dans un moule unique les tue à petit feu ?
Qu’il est plus important, et plus utile, de les faire parler que de les faire taire ?
Qu’il est plus important, et plus instructif, de les écouter que de pérorer ?
Que les accepter tels qu’ils sont,
turbulents ou calmes,
taiseux ou bavards,
distraits ou attentifs,
rêveurs et créatifs,
est le seul moyen de les aider à grandir, et d’apprendre à enseigner ?
Que l’effort n’a de valeur que pour celui qui y trouve un sens ?
Que la réussite n’a de valeur que collective, que celle des uns perd toute légitimité quand elle s’appuie sur l’échec des autres ?
École, crois-tu vraiment honorable le sinistre rôle de sélection et d’exclusion qu’on te fait jouer ?
École, on aura beau changer tes oripeaux, renouveler tes programmes, adapter tes horaires, tu ne changeras pas sans un supplément d’âme.
Ton obsession de la performance – ou de l’excellence, comme il est de bon ton de dire aujourd’hui – ton culte de l’évaluation, tatillonne et vaine, n’ont d’autre effet que de créer une spirale infernale d’inquiétude, de stress, de malheur où tu entraînes les enfants que l’on t’a confiés, et leurs familles avec eux.
Enfant, lève-toi !
Parle-lui, à ton école, ne te laisse pas museler.
Dis-lui avec tes mots simples et forts que tu n’es pas objet d’enseignement mais sujet d’apprentissage.
Ne la laisse pas tuer en toi le désir, la fierté, le bonheur.
Enfant, aide ton maître et ta maîtresse à devenir rebelles aux injonctions stupides, rétifs à l’évaluation forcenée, allergiques à la sélection.
Enfant, il a besoin de toi pour se réveiller, elle a besoin de toi pour se libérer.
Enfant, tu es l’avenir. Ne laisse pas l’école te le gâcher.
André
Dernière mise à jour le 12 mois par André