Dernier exploit en date dans mon pays contrasté: la sortie du gouverneur de Flandre Occidentale, la province de la côte, aux bénévoles apportant un peu de nourriture aux réfugiés:
« En les nourrissant, vous ne faites qu’en attirer d’autres. »
L’interdiction vaut déjà pour les mouettes, considérées comme nuisibles:
« Parmi les mesures destinées à diminuer les nuisances de ces oiseaux, les communes côtières ont notamment décidé d’interdire de les nourrir. »
Issu d’un parti qui se dit chrétien (oui, comme ceux qui se gargarisent de « valeurs » et applaudissent les déclarations humanitaires du pape), ce peu sympathique personnage suscite un concert de réprobation, auquel je ne peux que joindre ma modeste voix.
Voici un bel exemple de la façon dont de trop nombreux responsables publics présentent des humains en détresse comme un « problème », sinon comme des « nuisances », flattant sans vergogne les réflexes sécuritaires et xénophobes d’une partie de l’opinion publique. Comment s’étonner dès lors que parmi les réactions indignées de lecteurs du Soir, on trouve:
« plus cela sera facile plus ils viendront; désolé ce sont des illégaux. »
Illégaux ? Mais ce sont des êtres humains, en détresse qui plus est. Des actes peuvent être illégaux, pas des gens ! L’usage abusif du vocabulaire permet à peu de frais d’éviter questions dérangeantes et réflexion nuancée.
Illégaux ? Donc sans droits, sans existence même.
Illégaux ? Not in my backyard !
Illégaux ? Tant qu’on ne verra pas derrière ce paravent lexical des personnes avec un nom, une famille, une histoire, tant qu’on refusera de voir qu’il y a parmi eux comme parmi nous des gens bien différents, tant qu’on utilisera leur nombre et leur anonymat pour en nier l’humanité, ils resteront un « problème », et toutes les chasses à l’homme n’y pourront rien.
Bien plus, en niant ainsi leur humanité, c’est la nôtre que nous nions et détruisons.
[…] jours plus tard, c'est le gouverneur de Flandre Occidentale qui demandait aux bénévoles de Zeebrugge de ne plus nourrir les réfugiés, de crainte que cela n'en attire […]