Il y a quelques jours, la RTBF diffusait une soirée spéciale sur le thème du terrorisme, destinée à mieux comprendre quelques nuances de la situation difficile que nous vivons, destinée aussi à casser les préjugés qui collent comme un glu tenace à la peau de certains de nos concitoyens.
« Molenbeek, génération radicale ? », un modèle d’humanité et de clairvoyance, à mille lieues des obsessions sécuritaires, cherchait les racines d’un mal que nous ne comprenons pas, et le vrai visage des habitants de ce quartier de Bruxelles tant dénigré.
Un débat mené de main de maître, avec pudeur, empathie et rigueur, nous a montré des gens dignes, courageux, fraternels. Sans occulter la noirceur d’un paysage social dégradé, ces gens nous ont donné une leçon, modeste et si forte, de citoyenneté. Souvent désorientés, mais debout, souvent dépassés, mais sans baisser les bras, ils mettent le doigt tant sur leurs faiblesses que sur les incuries flagrantes d’une société sinon brutale, du moins coupablement indifférente.
Ils nous disent avec force ce que nos gouvernants refusent obstinément d’entendre: que ni les policiers ni les juges ne suffiront à éradiquer le désespoir et la violence, que sans un effort massif en éducation, aucune solution n’est possible, qu’on ne peut rejeter sur les individus seuls le poids de la responsabilité.
Ils nous disent « aimons-nous », et on a envie de les suivre.
Jusqu’où ?
Et puis, deux jours plus tard, la tempête américaine vient souffler brusquement cette petite lueur de vie. Ils ont élu à la présidence un bouffon misogyne, raciste, grossier, une caricature dont le pire n’est pas ce qu’il est, mais ce qu’il représente: la majorité des Américains, même si tous ne s’identifient pas à lui, voit dans ce nouveau président une image crédible de leur pays, une solution à leurs problèmes. Pire encore, près de 47% d’entre eux ne se sont pas prononcés, laissant à d’autres le soin de choisir, ou ne voulant pas trancher entre ce qu’ils percevaient comme la peste et le choléra. Résultat: l’égoïsme, l’intolérance, le populisme dans ce qu’il a de plus méprisable vont diriger l’Amérique pendant quatre ans, et donner des ailes à tous ceux qui, dans le monde, sont attirés par ces chimères.
Voilà bien où mènent ces politiques du pourrissement, des petits jeux de pouvoir, du mépris des gens modestes et de leurs difficultés. Voilà vers où, nous aussi, risquons de nous précipiter.
Au secours !
Mais d’où ce secours peut-il désormais venir ? Devrons-nous attendre un sauveur, au risque de nous jeter dans les bras du diable ? Ou prendre nous-même notre destin en mains, au risque d’une révolution qui ouvrirait grandes les vannes du ressentiment, de la violence, de pire peut-être ?
Finalement ces gens de Molenbeek, qui refusent la fatalité, tentent de se créer une vie, et restent malgré tout debout, ne sont-ils pas des contrepoisons ? Contradictoire et humain, ce nid de terroristes montre une voie.
Qui la suivra ?