Avec ses airs de petit village d’irréductibles Gaulois, la Wallonie a pu, jusqu’il y a peu, laisser croire à son opposition vis-à-vis d’un traité de libre échange dont bon nombre de ses citoyens ne veulent pas. On a même, naïvement, failli y croire. Certains se raccrochent comme ils peuvent à l’espoir que les parlements, ou au moins certains d’entre eux, renoncent à ratifier l’accord.
Mais le mal est fait: la route est désormais grande ouverte aux puissants prédateurs multinationaux. Dans « libre échange », le mot « libre » est un miroir aux alouettes, une tromperie, une insulte. La seule liberté, pour nous pauvres couillons de citoyens, est celle de fermer notre gueule, de payer, de subir. Les États vont désormais pouvoir demander poliment l’autorisation de protéger leurs citoyens des rapaces.
Cette Europe qui libéralise à tout crin, qui crée, à côté de la richesse de quelques-uns, misère, chômage, récession; cette Europe qui sait si bien tenter d’ériger des barrières contre le soi-disant danger des migrations, et qui ouvre grand la porte aux fraudeurs et voleurs de tout poil; cette Europe donneuse de leçons qui désagrège obstinément ses systèmes de protection sociale au nom d’un libéralisme sauvage; cette Europe-là, je n’en veux plus.
Bientôt ce sera le jour des morts, l’occasion de me souvenir d’un rêve européen jusqu’ici moribond, désormais enterré dans la boue des camps de réfugiés, sous la dalle de granit noir de ce traité assassin.